Genèse du geste continu (atelier de Ridha Dhib, 2004-2005)
Faire rhizome c'est porter le désir jusqu'à son envole
Faire Rhizome continue de battre
Vingt ans ont passé, mais la ligne n’a jamais cessé de se propager.
L’atelier clos est devenu un espace ouvert — la route, le réseau, la donnée.
Ce qui naissait alors d’un geste pictural s’est transmué en marche, en flux cardiaque, en dialogue avec les intelligences.
Faire Rhizome agit aujourd’hui comme un champ magnétique : chaque battement, chaque carte, chaque trace numérique prolonge sa vibration première.
La peinture s’est déployée dans le vivant — elle circule désormais dans le corps, dans le territoire et dans la machine.
Le Rhizome est devenu cardio-cartographique : il relie l’invisible, l’effort, la donnée et la mémoire.
Le geste est le même, seulement plus vaste.
Acrylique et charbon sur toiles, carton et bois, env. 300 × 200 × 200 cm, atelier de Ridha Dhib, 2005. Un fragment du souffle rhizomique : la peinture se plie, s’étend, se déploie comme une membrane en tension.
Acrylique et charbon sur toiles, carton et bois, env. 300 × 200 cm, 2005.
Une paroi de forces — zones d’accumulation, traces, fissures : la matière se fait réseau.Ridha Dhib dans Rhizome, acrylique et charbon sur toiles et bois, env. 350 × 200 cm, atelier de Ridha Dhib, 2005. Le corps devient mesure du plan. Le peintre marche dans la peinture — premier passage vers la Cardio-Cartographie.
Acrylique et charbon sur toiles, carton et bois, env. 400 × 200 cm, 2005. Le mur s’ouvre comme un organisme. Chaque pli appelle un autre, chaque tache devient ligne.
Faire rhizome, c'est un processus pictural continu - le déploiement d'une ligne infinie dans un espace clos. L’espace clos comme territoire, comme production de signes continus et mouvants, à articulations infinies et hétérogènes. Créer du territoire et revendiquer l’univers. Le territoire comme impulsion, l’univers comme mouvement continu. C’est la signature perpétuelle du corps dans une multiplicité de peintures qui se connectent, se contaminent, se raccordent, se voisinent et circulent, dans une infinité de combinaisons. Bref, de la matière-flux continue à travers les différents états de la ligne.
Acrylique et charbon sur toiles et carton, env. 450 × 310 cm, 2005. Rhizome à l’état brut — tension de la matière, excès du geste, vibration continue.
Acrylique et charbon sur toiles et bois, env. 400 × 400 × 400 cm, 2005. Le volume pictural engloutit l’espace. La ligne s’y perd et renaît — matrice d’un futur infini.
Acrylique et charbon sur toiles et bois, env. 550 × 350 cm, 2005. Le rhizome devient cosmos : pulsation, extension, errance.
La peinture inclut la ligne dans le temps. Elle inclut des vitesses, des repos, des plis et des déplis, des intensités variables, des enclaves et des disponibilités, c’est de la texture « matièrepli – matièretemps ».
Dans le mouvement improvisé et imprévisible du geste, la ligne s’actualise et se réalise en ignorant son propre déploiement. La substance même de la ligne, c’est-à-dire la matière/couleur se soumet aux forces physiques qui la plient et la fixent par nécessité. C’est une ligne mouvement/vitesse qui se tresse dans et par la matière/couleur, ce tressage constitue la topographie même de la ligne. Elle est mutante, polymorphe, elle s’actualise dans le mouvement, se réalise dans l’étendue et s’inclut dans la matière. Une ligne picturale.
« Quand la vague explose » (triptyque 2005)
Triptyque, acrylique et charbon sur toile, 100 × 150 cm, 2005. Transition entre le plan et le flux — la vague picturale se déploie en réseau.
« Ligne sans origine, puisqu’elle a toujours commencé hors du tableau qui ne la prend qu’au milieu, sans coordonnées puisqu’elle se confond elle-même avec un plan de consistance où elle flotte et qu’elle crée sans liaison localisable, puisqu’elle a perdu non seulement sa fonction représentative mais toute fonction de cerner une forme quelconque. »*
Ce n’est pas une ligne érudite, mais une ligne chargée de particules cosmiques. C’est une ligne qui n’est pas juste, mais rigoureuse. Ce n’est pas une ligne/segment, mais une ligne nomade. C’est une ligne nature qui ignore l’antériorité, ligne comme prolongement du mouvement du corps ; elle est produite comme signe abstrait parce que le geste s’est libéré de ses fonctionnalités. Désarticuler le bras et décodifier le geste. Le corps se prolonge comme machine de production, production nature/abstraite, d’où une zone d’indiscernabilité corps/cosmos.
Peinture/texture, ligne/expression est un processus dynamique qui n’a ni envers ni endroit, qui passe du plan au volume par plis et déplis, c’est un espace multidirectionnel et flottant. Ce sont les inflexions et les vitesses de la ligne, à travers la matière/couleur qui font la texture.
Acrylique et charbon sur toiles et bois, env. 300 × 200 cm, atelier de Ridha Dhib, 2005. Densité et micro-circulation : la matière se noue en un maillage serré — cartographie des impulsions.
Acrylique et charbon sur toiles et bois, env. 300 × 200 cm, atelier de Ridha Dhib, 2005. Flux en tension : le plan affleure comme une peau ; chaque fissure devient passage vers le réseau.
Plier la ligne, plier le plan, sont les conditions d’un espace à transformation continue, pas fond et forme, mais forme et déforme. L’œil est happé par un nomadisme pour dégager de la forme, forme qui se désagrège aussitôt après que l’œil a quitté ce mouvement. C’est un espace de textures que l’œil parcourt de façon tactile. Déploiement rhizomatique dans un espace monadique.
Ridha Dhib, janvier 2005