Mercredi 30 mars 2022 marque une étape importante et symbolique de mon périple « Ex-tracés », car elle correspond à la première traversée de frontière au cours de cette performance. Ce jour-là, j’ai entamé ma 16ᵉ étape, reliant Colmar à Freiburg, soit environ 49 kilomètres parcourus à travers des paysages en constante évolution.
Vers 7 heures, j’ai quitté Colmar, cette ville aux ruelles charmantes, bordée de vignes et empreinte d’une ambiance chaleureuse. La veille, j’avais partagé un moment fort avec l’association CIT et d’autres acteurs locaux lors de l’inscription du 15ᵉ passage de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés. Entre discussions sincères et une anecdote sur un mètre carré devenu un bac de terre, j’ai pris conscience de toute la dimension humaine et symbolique de ce chemin. Avec ces souvenirs, j’ai repris la route, mon sac à dos bien ajusté et l’esprit concentré sur l’étape à venir.
Au fil des kilomètres, le paysage changeait subtilement. Les zones urbaines et les vignobles laissaient place à une atmosphère plus austère et structurée, annonçant l’approche d’une frontière historique. L’un des moments forts de cette journée fut la traversée du Rhin. Devant un barrage imposant et les premiers drapeaux allemands, j’ai senti, autant physiquement que symboliquement, le passage d’un univers à un autre.
16e passage en braille de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés inscrit au milieu des vignes à 12 km de Fribourg. Est écrit : « …ractère internationaux, ne saurait, dans cette hypothèse, être obtenu… »
À environ 10 kilomètres de Freiburg, en pleine vigne, j’ai réalisé un geste qui fait désormais partie intégrante de mon parcours : l’inscription du 16ᵉ passage de la Convention de Genève. Munis de moyens tout simples, j’ai gratté la terre, recueilli quelques petits cailloux, et matérialisé ce moment précis sur le chemin. Ce rituel, ancré dans la réalité du terrain, se voulait un hommage discret aux réfugiés dont les trajectoires ont tracé ces routes. L’instant a été d’autant plus précieux que Yann, un photographe venu documenter cette étape, a su capturer cette scène grâce à des images aériennes réalisées par un drone, offrant un panorama inédit sur la vigne et sur moi-même en marche.
Malgré un ciel couvert, annonçant la pluie et une fraîcheur d’environ 9°C, ma détermination ne fléchissait pas. J’ai continué ma marche, empruntant même une piste cyclable qui me rapprochait de Freiburg, où une auberge de jeunesse m’attendait pour m’héberger pour la nuit. Ce dernier tronçon, tout en douceur, m’a permis de réfléchir à l’ensemble de la marche et à l’évolution de mon rapport au chemin. Chaque étape, chaque inscription, renforçait en moi ce sentiment d’être un véritable habitant du chemin.
Cette 16ᵉ étape a été marquante, avec la traversée d'une frontière et un geste symbolique sur le chemin. Ce fut un moment fort de mon parcours, ancré dans la réalité de la marche.